Article d’Isabelle Castéra, extrait du Journal Sud Ouest du 5 avril 2017.

C’est un petit plus offert aux artistes du Chœur de l’Opéra de Bordeaux. Six séances de sophrologie dispensées avant les répétitions, pour « faire du chœur une oasis de zénitude ».

Le néophyte ne peut se douter de l’engagement physique que représente le fait de chanter dans un chœur classique. Ce matin là, dans une salle de répétition de l’Opéra de Bordeaux, c’était autour des hommes de se déchausser avant de se lancer dans une séance de sophrologie. Comme une plongée à la lisière de la conscience, et ce, juste avant la répétition.

Catherine Bédécarrax, sophrologue à Bordeaux, dispense cet atelier à l’invitation du chef de chœur Salvatore Caputo. Parce que, dit-il, je suis toujours à côté de mes artistes, et la sophrologie peut leur permettre une détente nécessaire dans une profession exigeante. Je cherche à faire de l’Opéra de Bordeaux une oasis d’excellence, de bonheur, de zénitude, sans jamais perdre le lien avec le public. D’ailleurs, c’est le public de l’Opéra qui, le premier, à bénéficier d’une séance de sophrologie express, le 11 février 2017, juste avant le début du concert de Gabriel Fauré. Toute une salle yeux fermés, dans le silence, prenait conscience de sa respiration, de chaque partie de son corps, pendant trois minutes d’éternité.

“Je m’intéresse à ce qu’il y a autour de moi, à mon rythme cardiaque, je laisse le monde extérieur à l’extérieur”

Pour une cohésion du groupe

Donc ce matin, avant la répétition, les hommes du Chœur de l’Opéra attendent ce cours de pied ferme. Pierre : “Nous avons un rapport au corps particulier, très attentif. Nous sommes toujours en train de nous écouter, car notre corps est notre instrument. Pendant une séance de sophrologie, il se passe autre chose de nouveau. Pas de performance, on lâche le contrôle, la rigueur et on réinvestit d’autres parties du corps”.

Olivier : “On découvre un nouvel outil de relaxation et nous en avons besoin”. Certains auraient préféré que la séance de sophrologie se déroule en fin de répétition, d’autres en revanche, estiment que démarrer la journée par un moment de détente est “un pur moment”. Enfin, ce moment, cette parenthèse de paix, est pour eux, juste pour du mieux-être. Ils en sont pleinement conscients. “Tous les jours, ce serait parfait”, remarque Daniele.

Aujourd’hui, Catherine Bédécarrax, propose une séance pour “reprendre contact avec la peau”. Elle demande en préalable à chacun des participants comment il se sent et certains reconnaissent avoir mal dormi, être courbaturé… Puis, les yeux se ferment, les pieds posés à plat au sol, seule la voix de Catherine ponctue l’espace : “Je m’intéresse à ce qu’il y a autour de moi, à mon rythme cardiaque, je laisse le monde extérieur à l’extérieur, je m’intéresse à mes pieds, à mes mains, à mon cou”. La plongée est lente, pallier par pallier, chaque étape permet à un verrou de céder. Tous les bruits parasites du dehors s’étouffent, laissant l’énervement de la ville derrière les murs : la cloche du tram, les injonctions, les vrombissements…

Gestuelle d’auto-massages

Une fois que l’ensemble du groupe semble avoir lâché prise avec le réel, Catherine propose une gestuelle d’auto-massages, les poings fermés, sur toutes les parties du corps. Il s’agit de tapoter pour stimuler, éveiller, prendre conscience du cou, des chevilles, des coudes, des épaules, du crâne. Puis souffler, souffler encore. Il faudra doucement remonter à la surface, reprendre pied, se secouer et s’étirer comme des chats. Suivront les femmes du chœur, pour une initiation identique et forcément bénéfique. Lors de la soirée de concert Fauré, les artistes ont noté après les trois minutes de sophrologie, une attention du public toute particulière. Preuve qu’il s’était passé quelque chose.

La sophrologie, c’est quoi ?

La sophrologie est un terme créee par Alfonso Caycedo, médecin neuropsychiatre, né dans les années 30 à Bogota, orienté par l’école de psychiatrie phénoménologique et existentielle, pour désigner une méthode qu’il a conçue pour l’étude de la conscience harmonieuse et la conquête de l’équilibre corps-esprit, par la répétition de techniques psychocorporelles qui lui sont propres. Il s’agit plus particulièrement de la première science d’étude de la conscience. Initiée dans les années 60, elle ne cesse depuis d’évoluer. Cette pratique s’adresse à tous ceux qui souhaitent développer leurs capacités et leurs ressources dans leur vie personnelle comme professionnelle, mais pas seulement. Elle permet à des personnes en difficulté de trouver là un moyen d’apaisement, où le corps et le mental s’équilibrent enfin. On peut la pratiquer depuis l’enfance jusqu’à la fin de sa vie, car la sophrologie n’exige pas de capacités physiques exceptionnelles.